Reclassement et liquidation judiciaire

L’article 1233-4 du Code du travail dispose que « le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient » 

Avant tout licenciement pour motif économique, l’employeur doit donc rechercher et proposer aux salariés les postes disponibles au sein de l’entreprise, voire du groupe (Cass, Soc, 4 décembre 2007, n°05-46.073). L’employeur doit adresser à chacun des salariés dont le licenciement est envisagé des offres écrites et précises (Cass, Soc, 20 septembre 2006, n°04-45.703).

Lorsqu’il est placé en liquidation judiciaire, l’employeur est tenu par cette obligation de reclassement. Mais une différence existe avec l’employeur in bonis, prévue par l’article L. 3253-8 du Code du travail : pour que les créances soient garanties par l’AGS, le liquidateur judiciaire doit en plus procéder au licenciement du salarié dans un délai de quinze jours à compter de l’ouverture de la procédure de liquidation.

A la requête du liquidateur judiciaire d’une société, dans un arrêt du 5 février 2013, le Conseil de Prud’hommes de Béthunes a rédigé, à l’attention de la chambre sociale de la Cour de cassation, une question prioritaire de constitutionnalité pour qu’elle soit transmise au Conseil constitutionnel.

Le Conseil de prud’hommes demandait la reconnaissance de la non-conformité de l’article L. 1233-4 du code du travail à la Constitution, affirmant que cette différence entre employeurs en liquidation judiciaire et employeurs in bonis était contraire au principe d’égalité.

Dans un arrêt du 19 avril 2013, la chambre sociale de la Cour de cassation a refusé de transmettre la QPC au Conseil constitutionnel en affirmant que la question posée ne présentait pas de caractère sérieux car « le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes »

Elle poursuit en énonçant que « tel est le cas de la situation de l’employeur en liquidation judiciaire » qui est donc soumis à l’obligation de reclassement préalable au licenciement pour motif économique, au même titre qu’un employeur in bonis, avec une obligation en plus : celle de licencier dans un délai de quinze jours.

En effet, « cette différence est justifiée par le fait que les sommes dues au titre de la rupture sont prises en charge par un régime d’assurance garantissant les créances salariales contre l’insolvabilité des employeurs et que la réduction de la période couverte par la garantie satisfait à des raisons d’intérêt général. »

Selon la Cour de cassation, ne présente pas de caractère sérieux la question prioritaire de constitutionnalité tendant à considérer qu’est contraire au principe d’égalité les obligations imposées au liquidateur judiciaire : non seulement accomplir son l’obligation de reclassement, mais également procéder au licenciement dans un délai de quinze jours à compter de la liquidation.

Nadia TIGZIM
Avocat en droit du travail