Réticence dolosive et vente du fonds de commerce

La réticence dolosive dans la vente de fonds de commerce fait l’objet d’un contentieux abondant, résultant notamment de la déception de l’acquéreur sur la valeur du fonds qui lui a été cédé ou en raison de la découverte d’informations sur les caractéristiques du fonds acquis.

La tentation est alors grande de vouloir remettre en cause la vente alors que la sécurité juridique des affaires impose l’inverse.

La réticence dolosive, soit en langage non juridique le fait de tromper son cocontractant en passant sous silence des faits ou des éléments négatifs portant sur les conditions de la vente du fonds de commerce, ne peut par conséquent être invoquée à l’appui d’une demande d’annulation de ladite vente que sous la double condition que :

  • l’information tue soit essentielle et déterminante,
  • soit établie l’intention du vendeur de tromper son acquéreur.

C’est ce qu’avait notamment rappelé la Cour de Cassation par un arrêt du 7 juin 2011.

En l’espèce, l’acquéreur du fonds de commerce se plaignait d’une tromperie dolosive de son vendeur concernant la qualification exacte de l’une des salariées dont le contrat de travail avait été repris lors de la cession du fonds de commerce.

La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi en rappelant qu ‘il n’était établi ni l’intention de Mme X…de tromper la société Y… ni le caractère déterminant de l’information litigieuse sur les conditions de la vente, la cour d’appel en a exactement déduit que la demande, exclusivement fondée sur le dol, devait être rejetée ».

Par un arrêt du 6 janvier 2014, la Cour de Cassation a également confirmé que ces deux conditions étant établies, les silences et réticences du vendeur à l’acquéreur de son fonds entraînent la nullité et donc la restitution du prix de vente, sur le fondement du dol.

Dans l’affaire jugée le 6 décembre dernier, le vendeur avait non seulement tue que le fonds de commerce n’avait pas été exploité depuis plus de quatre mois au moment de la vente mais que le chiffre d’affaires qui était présenté à l’acquéreur provenait en réalité du locataire-gérant exploitant le fonds.

A la différence de l’arrêt de 2011, les juges ont alors estimé que les informations tues étaient essentielles et déterminantes (première condition remplie).

Ils ont également estimé que l’intention du vendeur de tromper son acquéreur et par conséquent la réticence dolosive ne faisait pas de doute tant la dissimulation était importante, le vendeur ayant sciemment présenté comme sienne la comptabilité du locataire-gérant (deuxième condition remplie).

L »annulation de la vente accompagnée de l’octroi de dommages-intérêts ne pouvait alors qu’être prononcée.

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Nadia TIGZIM
Avocat en droit des baux commerciaux