Du nouveau sur la requalification du CDD en CDI

Indemnités de requalification de CDD en CDI

Lorsqu’une requalification du CDD en CDI est prononcée, le salarié a droit à titre de dommages-intêrets :

  • à une indemnité de requalification, au moins égale à un mois de salaire (article L 1245-2 du Code du Travail).
  • aux indemnités correspondants à la qualification donnée par le juge des modalités de rupture du contrat de travail.

En effet, plusieurs cas de figure peuvent se présenter :

  • le salarié est toujours en poste et dans cette hypothèse, seule l’indemnité de requalification, qui est la conséquence de cette requalification, lui est due.
  • le contrat de travail a également été rompu et dans cette hypothèse, des indemnités pour rupture sans cause réelle et sérieuse peuvent également être dues.

En effet le plus souvent, aucune procédure ni motivation ni lettre de rupture n’ont précédé le départ du salarié de l’entreprise de sorte qu’en conséquence de la requalification, ce dernier est parfaitement fondé à faire également juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et obtenir des indemnités à ce titre.

Par un arrêt du 20 octobre 2015, la Cour de Cassation a tout de même fixé une limite à ce principe d’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de requalification du CDD en CDI. Afin d’apprécier l’étendue et la légitimité de l’indemnisation du salarié, une double vérification doit avoir lieu :

  • es-ce qu’une lettre mettant fin aux relations contractuelles de travail a été adressée au salarié?
  • les griefs contenus dans cette lettre matérialisant la rupture sont ils pertinents?

Dans cette affaire, un salarié, en CDD pendant 16 ans, avait saisi le Conseil des Prud’hommes en requalification de son contrat de travail et sollicitait en conséquence de la requalification du CDD en CDI l’octroi de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’avocat de l’employeur faisait quant à lui valoir que cette dernière demande devait être écartée dans la mesure où une lettre de rupture du CDD contenant des griefs précis et légitimes lui avait été adressée et valait par conséquent lettre de licenciement.

La position de l’employeur avait été écartée par le Conseil des Prud’hommes puis la Cour d’Appel qui estimaient que la requalification ouvrait droit aux indemnités de rupture pour licenciement sans cause sans avoir besoin d’apprécier les motifs contenus dans cette lettre de rupture.

La Cour de Cassation a infirmé cette  position : à partir du moment où l’employeur a pris la précaution d’adresser au salarié une lettre mettant fin aux relations contractuelles de travail, ainsi que le faisait valoir l’avocat de l’employeur, il est nécessaire de vérifier si les griefs ou les motifs contenus dans cette lettre peuvent constituer des griefs en mesure de fonder un licenciement.

Si la réponse est positive, le licenciement est causé et les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exclues.

En revanche dans l’hypothèse où d’une part aucune lettre de rupture n’a été envoyée et où d’autre part les motifs contenus dans la lettre sont insuffisants, la rupture du CDD devenu licenciement par l’effet de la requalification décidée par le Conseil de Prud’hommes entraînera le paiement des sommes et indemnités dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Nadia TIGZIM
Avocat en droit du travail