Le locataire peut-il se prévaloir d’une clause résolutoire insérée au bail commercial pour mettre fin à son bail commercial ?
La Cour de Cassation y a répondu par la négative par son arret du 27 avril 2017.
Le preneur ne peut mettre fin à un bail commercial avant terme que dans les conditions prévues par la loi.
Il ne lui est en effet possible de mettre fin à son bail de façon anticipé que :
- par la délivrance d’un congé dans les 6 mois précédant la période triennale,
- par la délivrance d’un congé en cas de départ à la retraite, invalidité ou décès.
Il peut également obtenir judiciairement la résiliation anticipée de son bail en cas d’inexécution contractuelle émanant du bailleur.
En somme, pour que le locataire puisse mettre fin à un bail commercial, il doit attendre la fin de la période triennale pour donner congé, ou justifier d’un départ à la retraite, d’une invalidité, d’un décès ou enfin d’une inexécution contractuelle du bailleur.
Ces conditions peuvent se révéler très contraignantes : dans l’espèce soumise à la Cour, le locataire avait alors tenté de déroger à ces modes de résiliation de droit commun en exploitant la clause résolutoire insérée au bail signé entre les parties.
Qu’est ce qu’une clause résolutoire ?
La clause résolutoire permet une rupture anticipée du bail commercial si le locataire manque à ses obligations contractuelles.
Le bailleur peut donc, dans cette hypothèse et par application de cette clause, mettre fin prématurement au bail.
La clause est notamment applicable lorsque le locataire n’honore plus le paiement des loyers, modifie les lieux loués ou cesse son activité commerciale.
Cette clause peut présenter une certaine insécurité pour le locataire, elle est donc de ce fait étroitement encadrée.
Ainsi, l’article L145-1 du code de commerce prévoit une procédure précise et dispose que: « Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. ».
Pour que la clause résolutoire puisse être mise en œuvre, le locataire doit manquer aux obligations expressément visées par la clause.
Le bailleur doit ensuite délivrer à son locataire un commandement et lui laisser un délai d’un mois pour se mettre en conformité.
De plus, ce commandement doit :
- être signifié par acte d’huissier,
- mentionner le délai d’un mois et la date à laquelle le manquement devra avoir cessé,
- reproduire la clause résolutoire,
- indiquer les manquements reprochés au locataire.
Ce même article prévoit une possibilité pour les juges saisis en constatation des effets de la clause, de permettre au locataire de réparer son manquement en lui octroyant un nouveau délai ou encore en suspendant les effets de la clause.
Le locataire dispose ainsi de plusieurs possibilités de régulariser sa situation et d’échapper à la résolution du bail.
A l’inverse, il ne peut cependant se prévaloir de cette clause pour échapper à ses propres obligations.
Le locataire peut-il se prévaloir d’une telle clause pour mettre fin au bail ?
En effet, la Cour de cassation a dans un arrêt du 27 avril 2017 confirmé la jurisprudence existante.
En l’espèce, le propriétaire d’un local commercial loué avait assigné son locataire après délivrance d’un commandement de payer les arriérés de loyer visant la clause résolutoire mais prétendait uniquement à une provision à valoir sur les arriérés.
Cependant, le locataire avait sollicité par demande reconventionnelle la résolution du bail par application de la clause résolutoire.
La Cour de cassation a alors répliqué que: «la clause résolutoire avait été stipulée au seul profit du bailleur et que celui-ci demandait la poursuite du bail, (…) la locataire ne pouvait se prévaloir de l’acquisition de la clause ;»
La non-régularisation de son manquement par le locataire ne conduit pas à la résolution du bail de plein droit. En effet, le bailleur doit confirmer son intention d’activer la clause et de mettre fin au bail.
Le locataire souhaitant mettre fin au bail ne peut intentionnellement manquer à ses obligations pour déclencher la clause résolutoire.
L’enjeu en est en réalité le paiement des loyers à venir : en effet, dans la mesure où le bailleur n’a pas sollicité la résiliation anticipée du bail, le locataire sera non seulement condamné à réparer le manquement ayant déclenché la mise en oeuvre de la clause résolutoire mais restera également redevable des clauses, conditions et loyers à venir jusqu’au terme naturel du bail faute pour le bailleur d’avoir sollicité sa résiliation anticipée.
Nadia TIGZIM