Grosses reparations et bail commercial

Le bail commercial est un contrat de location de locaux utilisés pour l’exploitation d’un fonds de commerce ou artisanal. La répartition des charges et des dépenses entre le locataire et le bailleur doit obligatoirement figurer dans le contrat de bail dans un inventaire précis et limitatif.

Cependant, au moment de la signature d’un bail commercial, il n’est pas rare qu’apparaissent des difficultés quant à cette répartition : les dépenses d’entretien et de réparations courantes sont par principe à la charge du locataire et celles de grosses réparations à la charge du bailleur.

Néanmoins, le bailleur est tenté de faire supporter l’intégralité de ces grosses réparations sur le preneur.

Toutefois, depuis l’instauration de la loi PINEL en 2014, le législateur a accru la protection du preneur en interdisant le transfert de l’intégralité des grosses réparations, incombant normalement au bailleur, à la charge du preneur.

AVANT LA LOI PINEL

Le bailleur avait la liberté de mettre dans le contrat une clause stipulant que les grosses réparations sont à la charge du preneur. La liberté contractuelle régissait les obligations de réparations entre preneur et bailleur.

DEPUIS LA LOI PINEL

Interdiction de transférer au locataire la charge des grosses réparations

Le statut des baux commerciaux interdit désormais expressément au bailleur de laisser à la charge du preneur les dépenses relatives aux grosses réparations de l’article 606 du Code civil, au moins lorsqu’elles peuvent être considérées comme des charges.

Cela est prévu par l’article L. 145-40-2 du Code de commerce : il est interdit pour le bailleur d’obliger le preneur à régler « certaines dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil, ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux ».

Cette disposition est d’ordre public c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de déroger à cette règle par une clause prévue au contrat de bail.

L’ensemble des dispositions relatives aux charges locatives, impôts, taxes, redevances et travaux ne sont applicables qu’aux baux commerciaux conclus ou renouvelés à compter de la publication du décret du 3 novembre 2014, soit à compter du 5 novembre 2014.

Cette nouvelle disposition fige donc la pratique qui consistait à stipuler dans les baux commerciaux une clause au profit du bailleur lui permettant de s’exonérer des grosses réparations.

Seule possibilité restante pour le bailleur étant de mettre à la charge du preneur conventionnellement les réparations liées à la vétusté du local loué mais ce, seulement si les travaux s’assimilent à des réparations d’entretien.

Le décret crée également un article R. 145-36 dans le Code de commerce qui impose désormais au bailleur d’adresser au locataire un état récapitulatif annuel des charges, impôts, taxes et redevances liés au bail. Il doit être communiqué au plus tard au preneur le 30 septembre de l’année qui suit celle au titre de laquelle il est établi.

Le décret crée aussi un article R. 145-37 dans le Code de commerce qui prévoit le délai dans lequel le bailleur doit communiquer au locataire l’état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes, assorti d’un budget prévisionnel, et l’état récapitulatif des travaux qu’il a réalisés dans les trois années précédentes, précisant leur coût. Ces documents doivent être communiqués dans le délai de deux mois à compte de chaque échéance triennale (tous les trois ans).

Ainsi, la loi Pinel met à la charge du bailleur un certain nombre d’obligations rendant désormais impossible le transfert des grosses réparations à la charge du preneur. Les dépenses restant à la charge du bailleur et les dépenses pouvant être mises à la charge du locataire sont présentées dans le tableau ci-après :

         Dépenses restant à la charge du bailleur

          Dépenses pouvant être mises à la charge du locataire

  • Dépenses relatives aux grosses réparations touchant au bâti : murs de soutènement et de clôtures, voûtes, digues, charpente et toiture
  • Dépenses relatives aux travaux liés à la vétusté ou de mise aux normes
  • Honoraires du bailleur liés à la gestion des loyers du local loué
  • Impôts, taxes et redevances liés à la propriété économique (CFE et CVAE)
  • Dépenses courantes d’eau, de gaz et d’électricité
  • Dépenses d’entretien et de réparations courantes : peintures, papiers peints, moquettes, appareils de chauffage, compteurs, sanitaires, volets extérieurs
  • Dépenses d’équipements de la copropriété
  • Travaux d’embellissement
  • Taxe foncière, taxe additionnelle à la taxe foncière, enlèvement des ordures ménagères

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Nadia TIGZIM
Avocat en droit des baux commerciaux