Résiliation judiciaire du contrat de travail à l’issue des arrêts de 2014 et 2015

C’est ainsi que notamment la modification unilatérale du contrat ne justifie plus en soi la résiliation judiciaire si cette modification, même unilatérale, n’a pas été préjudiciable au salarié et n’affecte pas la poursuite du contrat de travail.

C’est ainsi qu’est mise à mal la jurisprudence jusque-alors constante, selon laquelle « le mode de rémunération contractuel d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord, peu important que le nouveau mode soit plus avantageux»

Dans la première affaire, le salarié qui avait saisi le Conseil de Prud’hommes en résiliation de son contrat de travail a par conséquent été débouté à la fois par la Cour d’Appel de Rennes et par la Chambre Sociale dans la mesure où la baisse par l’employeur de son taux de commissionnement, bien qu’unilatérale, « n’empêchait pas la poursuite du contrat» de travail car la «créance de salaire résultant de la modification unilatérale du contrat de travail représentait une faible partie de la rémunération».

Même principe appliqué dans la seconde affaire où la Chambre Sociale déboute le salarié de sa demande de résiliation judiciaire en relevant que «la modification appliquée par l’employeur n’avait pas exercé d’influence défavorable sur le montant de la rémunération  perçue par le salarié pendant plusieurs années», et qu’ainsi, cette modification unilatérale «n’était pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail».

La résiliation judiciaire du contrat de travail doit être demandée rapidement

La portée des deux arrêts de 2014 a ensuite été affinée par l’arrêt rendue le 12 février 2015 qui a accueilli la résiliation judiciaire du contrat de travail dans une affaire similaire (modification unilatérale de la rémunération) mais à la différence des arrêts de 2014 :

  • cette modification plus grave avait conduit à «l’exclusion d’un secteur et d’une catégorie importante de clientèle qui étaient auparavant prospectés par le salarié………. de nature à affecter la rémunération du salarié »  et en conséquence emportait « modification du contrat de travail que l’employeur ne pouvait imposer ».
  • l’avocat du salarié avait agi immédiatement après avoir pris connaissance de la modification, ce qui était parfaitement logique dans la mesure où cette modification rendait impossible la poursuite du contrat de travail.

Prise d’acte ou résiliation judiciaire du contrat de travail ?

Quoiqu’il en soit, la résiliation judiciaire du contrat de travail est pour le salarié moins risquée que la prise d’acte à laquelle elle est souvent comparée. Les avocats devront alors conseiller leurs clients sur le recours à l’un ou l’autre de ces modes de rupture.

Rappelons en effet qu’en cas de prise d’acte, le salarié, non seulement perd son emploi immédiatement mais prend également le risque de voir sa rupture produire les effets d’une démission alors qu’en cas de résiliation judiciaire, non seulement le salarié continue à travailler, mais s’il est débouté, la relation de travail se poursuit.

A noter qu’il est possible d’effectuer tout d’abord une demande de résiliation judiciaire, puis prendre acte de la rupture du contrat lorsque la poursuite de la relation de travail s’avère insupportable.

Nadia TIGZIM
Avocat en droit du travail